• 8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Nativité" par Ivan Vecenaj (huile sur verre, 1970)

    Ivan Vecenaj (à ne pas confondre avec son frère cadet Stepan, lui aussi peintre!) nait en 1920. C'est donc un des doyens de notre galerie de portraits. L'image est désormais classique: ses parents sont pauvres et paysans, ont une petite ferme à Gola, sur la rive gauche de la Drave - qui coule vers l'est -, non loin de Hlebine (voir le petit plan sous la page d'accueil à gauche). Il ne restera que 4 ans sur les bancs de l'école primaire. Mais si Ivan ne compte pas parmi les fondateurs de l'Ecole de Hlebine, c'est parce qu'il ne commencera à peindre véritablement qu'en 1951. Son truc à lui, c'est d'insérer un thème biblique dans les paysages de la Podravina, ce qui donne lieu à des scènes cocasses, comme "la fuite en Egypte" sous la neige. Son imagination est l'écho des croyances et superstitions des villageois du début du XXème siècle.

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Le Coq" - Ivan Vecenaj, huile sur verre de 1972: un chapelet, une gousse d'ail, un fromage de chèvre?

     

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Jésus en Podravina", huile sur verre de 1975

    Ivan dit: "Le christ crucifié est en fait pendu, non à la croix, mais à un arbre. En dessous de lui, il y a un paysage de notre région, des vaches au pâturage, des lavandières qui font leur lessive dans la rivière. Un peu plus loin ,il y a notre village. Ce que j'ai voulu signifier, c'est que la vie continue: les gens travaillent, ils ont beaucoup de soucis, ils sont absorbés par leurs difficultés personnelles et ne font attention à personne, particulièrement pas aux souffrances du Christ (...). Sous lui, il y a une tête, celle d'Adam. Il y a un récipient dont on a bu le fiel et, un peu plus loin, un coq perché sur un arbre mort."

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Moïse et la Mer Rouge" (Ivan Vecenaj), huile sur verre 1973

    Ivan dit: "Il n'y a pas de tablettes de pierre dans ce tableau. A la place des dix commandements, j'ai peint des oiseaux. Chacun a une couleur différente et représente un commandement. Le blanc commande le respect des parents. Le corbeau est l'emblème de la mort et du meurtre, le messager de la guerre et des massacres. Le coq interdit de convoiter la femme d'autrui. Je montre Moïse au sommet de la colline en face de la Mer Rouge qu'il sépara en deux pour faire traverser les Israélites et où il noya le pharaon et son armée. Derrière Moïse, on aperçoit le mont Sinaï et l'aurore d'une vie meilleure".

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "La fuite en Egypte" par Ivan Vecenaj" (huile sur verre, 1967)

    Le tableau le plus célèbre d'Ivan est sans doute "La Cène", non représenté ici parce qu' il a été acquis par Yul Brynner (les Sept mercenaires) et qu'on ne voulait pas avoir d'histoires avec Yul . Si vous regardez "la Cène" quelque part sur Internet, remarquez le diable qui compte l'argent à coté de Judas. Le peintre, lui, s'est représenté appuyé à un arbre, la tête levée.

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "MoïseII" (détail), par Ivan Vecenaj - 1965, huile sur verre

    Le vieux berger ci-dessus (un peu "allumé", non? On pense à la bande-dessinée de Blueberry, "le spectre aux balles d'or") conduit son troupeau à travers une campagne tourmentée marquée par le Démon. Avec ce type de peinture, Ivan Vecenaj se singularise et enrichit la palette thématique des peintres naïfs croates. "On m'a souvent comparé à Dali", admet-il.

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Etudier le père", par Ivan Vecenaj (huile sur verre de 1956)

    Brr... Le père paraît broyer des idées noires!

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Masques de carnaval", dessin sur papier à la plume et encre de chine (Ivan Vecenaj 1971)

    Sur ce dessin, Ivan se rapproche des naïfs roumains, tel Ioan Maric.

    8. La Bible selon Ivan Vecenaj

     

    "Vache à la fontaine" par Ivan Vecenaj, carte postale un peu piquée de la collection de Nouba et Cébizar Lémek: un thème on ne peut plus classique pour terminer ce survol de l'oeuvre de Vecenaj. La vie  au village, les citrouilles et les courges Butternut sont prêtes mais ils ne connaissent pas Halloween.

    Cébizar Lémek (cebizarlemek.eklablog.com)


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  • 7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Josip Generalic: "Femmes de pêcheurs" 1971 - huile sur toile (pas sur verre)

    Difficile d'être le fils de son père Ivan, le fondateur de l'école de Hlebine, surtout si l'on veut aussi devenir peintre? Josip dit que non. Né en 1936, il a vécu son enfance dans le petit village, il a connu la guerre avec les yeux d'un gamin sans doute, mais n'en parle pas. Ce qu'il retient, c'est que son père devait adolescent peindre en cachette parce que ses parents n'appréciaient pas, que les gendarmes l'ont battu et emprisonné. Tandis que lui a toujours été entouré de peintures, et portait les toiles de son père à travers champs.

    Josip dit: "A mon avis mon père est un génie"

     

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Josip Generalic: "L'evêque rouge" (huile sur verre de 1973)

    Adulte, Josip s'en va vivre à Zagreb en 1961 où il est un moment instituteur avant que son activité de peintre naïf ne prenne le dessus.

    Josip dit: "Comme vous le voyez, ce n'est pas le centre de la ville. D'ici j'ai une belle vue sur la colline Sljeme et les vergers, si bien que j'ai devant moi les mêmes éléments de paysages qu'à Hlebine. Je réside au second étage. Et malgré cela, les branches de ce poirier pénètrent jusque dans ma chambre, le chien du voisin aboie sous mes fenêtres et, autour de mon logis, il y a des pommiers, des buissons de roses, des oiseaux qui chantent."

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Josip Generalic: "Les Beatles à Hlebine" - huile sur verre de 1975: John à l'accordéon, Paul à la contrebasse, Ringo à la trompette et George avec un tambour sur le dos. La culture pop s'invite dans l'art naïf yougoslave! (référence à la pochette de "Sergeant Pepper's" (1967), of course. "It was twenty years ago today, Sergeant Peppers told the band to play..."

    Par chance, Josip est influencé par les mouvements culturels des années '60, le psychédélisme ou le flower power. On le voit peindre des hippies au festival de Woodstock et dessiner des guitaristes de Rock. Il donne un nouveau souffle à l'art naïf de son pays avec ce chouette tableau des Beatles et son incroyable Sophia, dans la neige de la Podravina avec son chat, à des années-lumière des paysannes de Mijo Kovacic!

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Sophia Loren (huile sur verre de 1973). Superbe, non?

    Josip se présente comme un optimiste qui veut communiquer à ses peintures l'amour de la vie, la beauté de la vie et celle de la nature. C'est naïf sans doute, mais on parle ici d'art naïf, non?

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Josip Generalic: "Une femme avec une fleur", huile sur verre de 1972. (ce n'est pas Lucie dans le ciel avec des diamants)

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

    Josip Generalic:"Le domestique", huile sur verre de 1973 (remarquez le bouton de veste qui pendouille)

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     "Winter scene" par Josip Generalic, carte de voeux anglaise du début des années '80

    Josip insiste sur le fait qu'il a souvent demandé conseil à son père: "Pourquoi cette couleur a-t-elle l'air délavée?". Il dit: "Vous seriez étonné d'apprendre combien il est difficile de peindre sur verre un arbre en fleurs sans que, finalement, il n'en résulte rien d'autre qu'une tache d'une seule couleur. Au début, vous ne pouvez pas savoir qu'il faut laisser des espaces entre les feuilles, sinon tout se confond en une seule teinte et l'on finit par ne plus rien faire d'autre qu'une tache abstraite."

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     Sans titre, alors on va dire "paysans coupant du bois", Josip Generalic, carte postale belge de 1982

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

    Sans titre, "Promenade d'hiver" (?), par Josip Generalic en 1977. Carte postale belge

    7. Josip Generalic, heureux fils de son père

     "Le bonhomme de neige" par Josip Generalic (1969), carte postale française un peu piquée

    Les trois cartes postales ci-dessus nous ramènent à des thèmes plus classiques de l'art naïf tout court, auxquels est attaché Josip, hanté par les souvenirs d'une campagne qui ne sera plus celle qu'il a connue, d'une enfance de plus en plus lointaine. Toujours la même histoire, celle des Kinks et du "Village green". Qu'elle était verte ma vallée.

    Josip dit: "J'ai la nostalgie du spectacle que m'offrent les fleurs qui grandissent, telles que je les observais petit garçon. Elles poussaient plus haut que ma tête, semblables à une forêt croissant le long d'une rivière. Je m'imaginais alors que les fleurs étaient des arbres, et c'est pour cette raison peut-être que je les peins comme cela. Si je dois descendre en ville, c'est ce que j'éprouve de plus pénible au cours de ma journée".

    Josip est parti en 2004

    Cébizar Lémek (cebizarlemek.eklablog.com)


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